Le Conseil d’État vient de valider le plafonnement des loyers à Paris et à Lille, rejetant les recours de plusieurs associations de propriétaires. Le dispositif d’encadrement des loyers est donc maintenu.
1. Un dispositif appliqué dans de nombreuses communes…
Prévu par la loi Alur en 2014, le dispositif d’encadrement des loyers a été mis en place de façon expérimentale pour une durée de 5 ans, dans le cadre de la loi ELAN. D’abord à Paris, l’encadrement a été voté par la suite à Lille, dans plusieurs communes de Seine-Saint-Denis et du territoire Est Ensemble, puis à Lyon, Villeurbanne, Bordeaux et Montpellier. La Loi 3DS de février 2022 a prolongé cette expérimentation de trois années supplémentaires.
Le dispositif repose sur trois tarifs : un loyer de référence, un loyer de référence majoré (supérieur de 20%) et un loyer de référence minoré (diminué de 30%). Ces tarifs sont déterminés en fonction du marché locatif observé et déclinés par secteurs géographiques, regroupant un ou plusieurs communes ou quartiers, et par catégories de logement (appartement/maison, nombre de pièces, nu/meublé et époque de construction du bâtiment). Le loyer hors charges d’un logement mis en location ne pourra pas excéder le niveau du loyer de référence majoré ainsi déterminé.
2. … mais inégalement respecté
L’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) et la Chambre nationale des propriétaires contestaient la légalité du dispositif. Leurs arguments n’ont pas su émouvoir le juge. « Une bonne nouvelle pour les locataires qui en ont assez des loyers trop chers, a souligné l’adjoint à la Maire de Paris, chargé du logement Ian Brossat. Nous allons nous atteler à les faire respecter », a t-il précisé.
Un vrai challenge, puisque d’après le baromètre de l’Observatoire de l’encadrement des loyers de la Fondation Abbé Pierre, publié en octobre 2021, à Paris 35% des annonces ne respectent pas ce dispositif. En moyenne le dépassement est évalué à 196 euros par mois. Il concerne majoritairement les petites surfaces (47% des logements de moins de 30 m2) et les biens situés dans le centre et l’ouest parisien. À l’automne 2022, l’Observatoire va étendre son étude aux autres territoires concernés par le dispositif.
3. Des sanctions bientôt davantage appliquées ?
Des sanctions sont prévues à l’encontre des propriétaires qui ne respectent pas l’encadrement des loyers. Ils peuvent se voir contraints de mettre le contrat en conformité et de rembourser au locataire les trop-perçus. Ils encourent en outre une amende administrative plafonnée à 5.000 euros pour une personne physique et 15.000 euros pour une personne morale. Dans les faits, peu de locataires agissent. En décembre 2021, la Commission départementale de conciliation (CDC) n’a reçu que 252 signalements et seulement une dizaine d’amendes a été notifiée aux bailleurs pour des montants n’excédant jamais 1.500 euros.
Mais la situation pourrait changer. La loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale – dite 3DS – de février 2022 prévoit la possibilité de transférer le pouvoir de sanction du préfet au maire afin de mieux faire respecter la réglementation. Paris a demandé cette délégation du pouvoir de contrôle et sanction en matière d’encadrement des loyers pour lutter plus efficacement contre les abus.
4. Quelles opportunités pour les propriétaires ?
Si la mesure permet de stabiliser les loyers et donc de préserver le pouvoir d’achat des locataires du parc privé, elle peut avoir des effets délétères pour les propriétaires qui comptent sur l’encaissement des loyers pour régler leurs mensualités d’emprunt.
Quelles solutions envisagées ? Le marché de la location de courte durée, certes plus rentable, a vu sa réglementation se complexifier et leur est désormais difficilement accessible.
Reste à exploiter les possibilités offertes par le dispositif d’encadrement des loyers. Le bailleur peut utilement s’appuyer sur le loyer de référence minoré, pour augmenter le loyer si celui-ci est trop bas par rapport aux prix du marché. Il peut également demander un complément de loyer, si son bien le justifie par des conditions de confort ou de localisation déterminantes. Outre investir dans un bien de qualité, par exemple un bien situé dans un immeuble classé, disposant d’une grande terrasse ou avec une vue sur un monument parisien par exemple, le propriétaire pourra utilement investir dans des équipements de grande qualité : mobilier design, jacuzzi, home cinéma… Cela lui permettra d’augmenter son loyer de référence de 20% en toute légalité, mais toujours dans les limites de l’encadrement.